Sahara occidental : les missionnaires oblats de Marie Immaculée prêchent par le silence

Dans les immensités désertiques du Sahara occidental, quelques hommes en sandales choisissent de rester là où plus rien ne pousse sauf la foi. Les Missionnaires Oblats de Marie Immaculée y vivent une « pastorale de présence » : pas de grandes paroles, pas de conversion spectaculaire, juste la force tranquille d’une fraternité partagée au milieu du vent, du sable et des oubliés.

Un horizon de sable, un engagement sans frontières au Sahara occidental

À Laâyoune, capitale du Sahara occidental, le soleil tombe comme une enclume sur les toits plats. Quelques enfants jouent dans la poussière, des silhouettes d’hommes traversent la rue, le regard fatigué. Derrière une porte anonyme, une petite communauté chrétienne s’active discrètement : les Missionnaires Oblats de Marie Immaculée, cinq prêtres venus de loin, installés ici pour vivre l’Évangile au quotidien mais sans bruit. « Nous sommes peu nombreux, mais nous ne sommes pas seuls », confie le père Ranjemo Christophe, le regard tourné vers l’horizon. « Ici, l’Évangile se dit dans le regard, dans la main tendue, dans le sourire. »
Leur mission ? Être là, tout simplement sans luxure ni bruit. Une présence humble et obstinée dans un territoire où la foi chrétienne se vit dans la discrétion la plus totale.

Une Église qui marche avec les invisibles sous le regard de L’esprit saint

Le Sahara occidental n’est pas seulement une carte postale de dunes et de silence. C’est aussi un carrefour de migrations. Des milliers d’hommes et de femmes d’Afrique subsaharienne traversent ces zones hostiles, en quête d’un avenir ou d’un refuge en Europe. C’est auprès d’eux que les Oblats de Marie Immaculée ont choisi de se tenir. Chaque semaine, ils reçoivent des dizaines de migrants, souvent épuisés, blessés, sans papiers mais surtout, ils écoutent. « Certains n’ont pas entendu une parole bienveillante depuis des mois », raconte le père Jean-Marie Faye. « Ici, nous ne faisons pas de discours. Nous offrons une oreille, un sourire, une présence. » Ce geste simple, répété chaque jour, devient une liturgie du concret, une manière d’incarner la miséricorde dans un lieu où l’on survit plus qu’on ne vit.

Dialoguer sans convertir au Sahara occidental

Les Oblats de Marie Immaculée vivent au cœur d’un monde musulman, dans un environnement où le prosélytisme est strictement interdit. Leur mission ne consiste donc pas à prêcher, à administrer des sacrements mais à tisser des liens. Ils partagent le thé avec leurs voisins, échangent sur la pluie, la chaleur, le soleil, le travail et la vie. Peu à peu, la méfiance s’efface, la confiance s’installe.« Le dialogue interreligieux ici ne se fait pas dans les conférences, mais autour d’un bol de couscous », sourit un père de la communauté. « Il se vit dans le quotidien, dans le respect mutuel. » Cette pastorale du vivre-ensemble devient une forme d’annonce silencieuse : montrer, par la vie, que Dieu n’exclut personne.

Le désert du Sahara occidental, une école de lenteur et de foi

Au Sahara, le temps s’étire. Les journées sont longues, les nuits glacées. Les Oblats de Marie Immaculée apprennent à vivre dans cette lenteur, à accueillir chaque rencontre comme une grâce.
Le désert devient pour eux un maître spirituel : il dépouille, il recentre, il apprend à aimer sans attendre. « Ici, tout s’efface : le bruit, la réussite, les certitudes », confie le père Ranjemo Christophe. « Ce qu’il reste, c’est la vérité de l’homme. Et cette vérité, c’est Dieu. » Dans ce silence infini, leur foi devient résistance : celle de croire, malgré tout, en la bonté du monde.

Au Sahara occidental : Petits gestes, grands signes

À Dakhla, autre point de mission, une petite chapelle blanche se dresse à deux pas de la mer. Chaque dimanche, une dizaine de fidèles, souvent migrants, y viennent prier. La messe se célèbre dans plusieurs langues, parfois sans instruments, mais avec une ferveur étonnante. Entre deux chants, le prêtre élève les bras : dehors, le vent souffle si fort qu’on l’entend jusque dans la nef. Et pourtant, personne ne bouge. Dans ce désert, la foi tient bon. Les Oblats ont peu de moyens, mais ils incarnent une conviction puissante : qu’une présence fraternelle vaut plus que mille sermons.

Une Église qui murmure dans le vent du désert

Leur mission, discrète mais constante, bouleverse ceux qui croisent leur route. Certains repartent, d’autres restent, tous gardent le souvenir d’un accueil inconditionnel.« Dans un monde saturé de paroles, leur silence est un cri », note un chrétien rencontré sur place. Les Oblats, eux, ne revendiquent rien. Ils poursuivent, jour après jour, leur engagement au cœur du désert, fidèles à la devise de leur fondateur, saint Eugène de Mazenod :
“Évangéliser les pauvres et les plus abandonnés.” Dans le Sahara occidental, cela signifie parfois simplement être là comme une lampe allumée dans la nuit, fragile, mais qui ne s’éteint jamais.

Père Gilbert VANDI,omi